Par Stéphane Rochet – 29 janvier 2025
Observer les athlètes des CrossFit Games en compétition peut être une expérience très enrichissante. Nous pouvons apprendre de leur échauffement, de leur récupération et de leurs stratégies de gestion de l’effort, qui sont généralement très efficaces. Cependant, il est crucial de comprendre les différences fondamentales entre l’entraînement pour la santé et la forme générale, et ce que nous observons chez les athlètes de haut niveau.
Tempo des répétitions
En compétition, l’objectif est d’aller aussi vite que possible. Les athlètes enchaînent les phases excentrique (« descente ») et concentrique (« montée ») de chaque répétition à une vitesse maximale, sans pause entre les mouvements. C’est une approche que nous pouvons parfois adopter, à condition de maintenir une technique sûre et efficace. Mais cela ne devrait pas être notre mode d’entraînement principal.
En général, que l’on s’entraîne pour un sport, pour la forme physique, ou pour un métier exigeant comme militaire, pompier ou policier, la majorité de nos répétitions devraient comporter une phase excentrique fluide et contrôlée, suivie d’une phase concentrique explosive, avec une courte pause pour se replacer avant la répétition suivante.
Par exemple, pour un back squat, nous descendons en contrôlant la charge jusqu’en bas, puis nous poussons avec force dans le sol pour nous redresser aussi vite que possible. Avec des charges lourdes, la montée ne sera pas forcément rapide, mais l’intention d’accélérer est essentielle. Ensuite, une courte pause (moins d’une seconde) nous permet de nous repositionner correctement pour la répétition suivante.
Si vous vous demandez quel impact cette approche aura sur votre temps lors d’un metcon, la réponse est : très peu. Les répétitions seront peut-être légèrement plus lentes, mais elles seront aussi plus efficaces. De toute façon, la meilleure manière d’améliorer son temps sur un WOD reste de réduire le nombre et la durée des pauses.
L’accent doit être mis sur les avantages d’un tempo plus lent et des contractions isométriques, qui sont d’excellentes méthodes pour renforcer la technique et la force. Les athlètes de haut niveau utilisent régulièrement ces méthodes pour progresser. Il est important de comprendre que la vitesse d’exécution en compétition n’est qu’une façon de performer un mouvement et ne devrait pas être notre standard principal en dehors de ce contexte.
Amplitude de mouvement
Les compétitions de CrossFit définissent précisément l’amplitude minimale requise pour chaque mouvement. Ces standards sont de bons repères pour l’entraînement, mais ils ne doivent pas limiter notre amplitude si nous pouvons aller plus loin.
Par exemple, pour les mouvements de squat, le standard en compétition exige que l’athlète commence en position debout, descende jusqu’à ce que le pli de la hanche passe sous le niveau du genou, puis se relève complètement. En compétition, les athlètes ne descendent pas plus bas que nécessaire pour respecter ce standard, ce qui est totalement acceptable.
Toutefois, dans un objectif de forme physique générale, si nous avons la mobilité nécessaire, nous devrions chercher à descendre 2 à 3 cm plus bas que cette norme, tout en maintenant une bonne posture. Cela ralentit nos répétitions, mais le gain en force, en mobilité et en capacité articulaire en vaut largement la peine.
De plus, en compétition, certains athlètes adoptent des stratégies pour s’assurer que leurs répétitions sont bien validées par les juges. Par exemple :
- Avancer la tête sur des mouvements au-dessus de la tête (thrusters, presses, jerks) pour éviter que la barre ne soit jugée trop en avant.
- Se cambrer exagérément en haut du deadlift pour montrer clairement que les hanches sont verrouillées.
Ces ajustements peuvent être utiles en compétition, mais ils n’ont aucune valeur en entraînement et peuvent même être nuisibles s’ils sont adoptés à long terme.
Technique
Les athlètes de haut niveau affichent généralement une excellente technique, car un mouvement efficace permet une meilleure performance. Cependant, sous la pression de la compétition, certains font des compromis techniques pour gagner du temps ou soulever plus lourd.
Exemples courants :
- Rebondir la poitrine au sol sur les pompes
- Étendre exagérément le menton en haut des pull-ups
- Faire rebondir les poids en deadlift
- Rebondir violemment le genou arrière en bas des fentes
- Utiliser la jambe arrière en step-ups
En dehors de la compétition, ces écarts techniques diminuent l’efficacité de l’entraînement et réduisent les bénéfices des mouvements.
Quand on approche de nos charges maximales, il est naturel que la technique se détériore légèrement. C’est pourquoi nous voyons parfois même les meilleurs athlètes avoir les genoux qui rentrent vers l’intérieur sur un squat lourd ou le dos qui s’arrondit sur un deadlift maximal.
Ces écarts sont acceptés en compétition car l’objectif est d’optimiser la performance à tout prix. Mais ce n’est pas ce que l’entraînement devrait être.
En entraînement, nos répétitions maximales doivent ressembler aux répétitions sous-maximales, à une vitesse de barre simplement plus lente. Si des fautes apparaissent et ne peuvent pas être corrigées, il faut réduire la charge. Si des fautes majeures surviennent, cela signifie que la charge est trop lourde et qu’il faut ajuster.
Alimentation
Manger des bonbons ou boire du soda après un WOD est une stratégie spécifique à la compétition. Les athlètes des CrossFit Games utilisent des bonbons ou des boissons sucrées pour récupérer rapidement et être prêts pour l’épreuve suivante.
Mais cette approche n’a aucun intérêt pour la santé. En dehors d’une urgence à reconstituer les réserves de glycogène, nous devrions privilégier des aliments naturels et non transformés comme des fruits, des patates douces ou du miel brutpour récupérer après un entraînement.
Gérer les blessures
En compétition, les athlètes continuent parfois à performer malgré des blessures graves : tendons rompus, muscles déchirés, fractures… Rien ne les arrête.
Cette détermination est impressionnante, mais elle ne doit pas être un modèle à suivre pour nous.
Si notre objectif est de maintenir notre santé et notre forme physique sur le long terme, nous devons écouter notre corpset ne pas laisser une petite douleur se transformer en blessure grave.
Douleur ≠ inconfort. L’entraînement amène souvent de l’inconfort, mais il ne doit pas provoquer de douleur intense ni endommager nos articulations.
Il est essentiel de faire la différence et d’adopter une approche prudente :
- Réduire le volume d’entraînement
- Adapter les mouvements
- Se soigner
- Se concentrer sur la récupération
Il n’y a aucune raison de s’entraîner jusqu’à la blessure.
Conclusion
Les athlètes des CrossFit Games peuvent nous apprendre beaucoup, mais nous devons comprendre leur contexte. Leur objectif est de gagner, décrocher des primes et des sponsors. Leur priorité n’est pas la santé à long terme.
Nous devons donc choisir les méthodes qui nous aideront à progresser intelligemment, et ne pas copier aveuglément ce que nous voyons en compétition.